Le Poitou secret
Huit heures et nous sommes prêts à partir. Depuis
plusieurs années nous devions le faire mais comme toute chose facile à mettre en œuvre, on reporte. On se penche toujours sur ce qui nous parait être plus riche en découvertes, en rencontres et
en insolite, plutôt que de voir ce que l’on pense connaître car c’est le décor où l’on vit quotidiennement.
Dans le cadre de la préparation à nos grandes randonnées, nous avons décidé de faire une petite
randonnée permanente locale, proposée par notre ami Jean-Pierre Poteau président du club cyclotouriste de Vasles en Deux-Sèvres. Son nom est très évocateur « A la découverte du Poitou
secret ». Longue de 120 kilomètres, elle va de Poitiers au cœur du Poitou, à Coulon au cœur du marais poitevin, en passant par la Gâtine et le pays de Parthenay.
Pour nous afin de pouvoir découvrir ce que nous n’avons pas vu sur ces routes que nous
empruntons régulièrement en voiture, nous avons décidé de faire le voyage sur deux jours.
Ce matin nous quittons Saint Benoit par un temps ensoleillé mais encore frais, direction
Vouneuil-sous-Biard. Commune de la périphérie de Poitiers, malgré une expansion en trois zones distinctes, le centre bourg, au nord Pouziou la Jarrie et au sud, Précharaud les deux Mazais, elle à
su conserver son caractère particulier et les traces de sa ruralité. Deux églises au bourg et à la Jarrie, un pigeonnier et un four à pain propriétés communales au nord, au centre, un lavoir, une
chapelle, un moulin, une fontaine et plusieurs calvaires de mission, au sud, l’aqueduc de Fleury du XIXe a remplacé l’ancien aqueduc gallo romain qui alimentait Poitiers.
Nous faisons pointer nos cartes de route à la mairie et prenons la route de Béruges, le soleil commence
à nous réchauffer et c’est agréable. Rapidement nous arrivons en vue de la petite suisse poitevine, tel est le surnom de Béruges en raison de l’étendue de sa forêt qui couvre presque la moitié de
la commune. Elle possède des vestiges gallo-romains conservés et présentés dans le jardin archéologique ainsi que la tour de Guyenne, forteresse médiévale et plusieurs châteaux du
XIXe.
Photo Patrice Plantureux
L'Abbaye du Pin
En quittant Béruges nous faisons une halte à l’abbaye du Pin. L'abbaye fondée vers 1120 par Giraud
de Salles, sa construction s'achève en 1141. D'abord sous la règle bénédictine, elle changea d'ordre en 1163 pour passer à l'ordre de Cîteaux. Sa prospérité est due à l’abbé Pierre Million
aumônier de Richard Cœur de Lion, Elle reçut le privilège du minage en 1198. Elle avait le monopole de la fabrication des boisseaux, unité de mesure des grains, comprise entre 25 et 36 litres. Le
droit de minage fut contesté, par Philippe le Bel, qui obligea l'abbaye à partager les fruits de cette taxe avec le royaume de France.
Au XVIe siècle, l’usage fait du monopole d'importation des grains provoqua plusieurs émeutes.
Il s'avéra qu'en fait, les moines achetaient le blé avec un boisseau d'une taille significativement supérieure à celle du boisseau qui servait à mesurer le blé qu'ils vendaient. L'abbaye faisait
ainsi un bénéfice beaucoup plus important. Avant d'être élu pape sous le nom de Léon Xen 1564Jean de Médicis fut abbé commendataire du Pin
Saccagée, pillée et incendiée en 1569 lors du siège de Poitiers, par les troupes protestantes de
l'amiral de Coligny, l'abbaye ne put faire de travaux de restauration, et la voûte du chœur s'effondra vers 1600. On supprima le transept à cette époque également.
En 1649, l’abbé Pierre Gautier a du faire face à une révolte des moines, rebelles à sa
volonté de restaurer également la discipline de la règle. Refusant de renoncer à leur vie de bonne chère, ils se barricadèrent dans les murs de l'abbaye et lui refusèrent l'entrée un certain
temps.
L'abbaye vendue comme Bien national en 1792. Achetés en 1938 par une paroisse d'Asnières-sur-Seine
afin d'accueillir une colonie de vacances. Enfin, en 1945, faute d'entretien, le toit de l'église s'effondra partiellement, avant d’être abattu totalement en 1952.
Dans les années 1990, l’abbaye est devenue un centre d'hébergement pour les groupes scolaires, classes
vertes, retraites. L’été, c'était un centre de vacances pour la paroisse Sainte-Geneviève d’Asnières-sur-Seine. Elle a accueilli de 2006 à 2010 un festival de musique. De nos jours, c'est un lieu
de réceptions à louer pour recevoir lors de congrès, de séminaires, de repas de famille, de mariages...
Phot Laurent Dagrada 2010
Le château de Montreuil-Bonnin
Nous faisons une petite visite de Montreuil-Bonnin et admirons les ruines du Château dont la construction aurait été faite
par la fée Mélusine pour y cacher son fils borgne surnommé monstre en œil, d’où le nom de Montreuil. C’est beau les légendes !
Plus prosaïquement, le château fut construit au XIe siècle. En 1180 Richard cœur de Loin y installe un
atelier monétaire et Aliénor d’Aquitaine y réside. En 1224, le château pris par Philippe Auguste, qui y installe les Montmorency, puis en 1242, il est repris à Hugues X de Lusignan par Louis IX.
Le château est brûlé par le comte de Derby, les ouvriers de l'atelier monétaire sont pendus aux créneaux en 1346 et faudra attendre 1375 pour que Du Guesclin le reprenne aux
anglais. Incendié trois fois par les troupes d'Henri IV pendant les guerres de religion, il sera finalement vendu et démantelé à la révolution.
Photo Christian Huort
La commanderie de Lavausseau
Quatre kilomètres plus loin nous faisons une grande halte à Lavausseau, village remarquable de la Vienne
par son activité de tannerie. Dès le 12ème siècle la présence de la commanderie de Lavausseau appartenant à l’ordre des hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem, actuel Ordre de Malte, est
attestée. On suppose que ce sont eux qui auraient été à l’origine du développement des tanneries. Toutefois le document le plus ancien connu est un procès-verbal concernant le tanneur Mathurin
Ruffin daté de 1577. En 1811, onze tanneries se tenaient sur le bord de la rivière...
Aujourd’hui, la visite de la tannerie en activité permet de découvrir un
savoir-faire ancestral. Dans une atmosphère pittoresque, le tanneur, qui travaille devant le spectateur, utilise aujourd'hui encore un circuit de fabrication artisanal avec des cuves et des
tonneaux vieux de près d'un siècle. Le chemin des tanneurs facilite la découverte des charmes du vieux bourg et la commanderie.
Onze heures trente et il nous reste encore huit kilomètres pour arrivé à Vasles où
nous avons prévu le pique nique. Maintenant il fait chaud et un peu avant midi nous trouvons une petite supérette pour acheter de quoi nous restaurer installé sur la place du 25 août 1945. Notre
repas fini nous allons boire un café bar restaurant « La Place » situé à deux pas.
Vasles, c’est Mouton Village, parc touristique animalier que Janine connait par cœur car,
quand ses petits-enfants étaient moins grands, à toutes leurs vacances, la visite était au programme. Parc de 6 hectares classé refuge LPO, arboré d’essences et de végétaux
variés, on y avance comme on respire, librement, au gré de ses envies et où les enfants pourront courir, jouer…en toute sécurité. "Mouton Village" est le 1er Parc en France à accueillir 21 races
ovines du monde entier. Saviez-vous qu’il existait un mouton "à tête de lapin", un autre "à quatre cornes". Chacun à son caractère et ses habitudes. Partir à leur rencontre est une expérience
aussi originale qu’instructive. Avec l’audio guide, vous marcherez sur les traces de Nicolas et son grand-père le berger. Ils vous livreront les secrets d’une histoire qui se joue devant vos yeux
en grandeur nature.
photo Christian Huort
Le terrier de Fouilloux, point culminant des Deux-Sèvres
Pour nous il fait de plus en plus chaud et il est temps de repartir car au programme, avant ce
soir, il reste l’escalade du point culminant du département, "Le Terrier du Fouilloux", d'une altitude de 272 mètres. Chose faites, direction La Chapelle-Bertrand où un arrêt s’impose pour deux
raisons. Premièrement comme il fait une chaleur presque torride, un bon rafraichissement au café du village s’impose, ce qui nous permet de remplir nos bidons d’eau fraîche. Deuxièmement voir le
château.
Le chevalier Louis Normandin fut le premier seigneur connu, du château de la
Chapelle-Bertrand, au XIVe siècle. Construit dans une cour fermée. Il comprend quatre niveaux. De plan rectangulaire, il offre une façade sud dotée de deux tours rondes couvertes d'une toiture
conique et d'une tour polygonale en saillie au centre, contenant l'escalier de distribution. Au rez-de-chaussée, les salles sont disposées en enfilade, respectant ainsi une organisation héritée
du Moyen Age. A l'inverse, l'étage annonce déjà une évolution des circulations. En effet, l'escalier s'ouvre sur un long corridor qui permet de desservir les différentes pièces. Propriété privée
le château ne se visite pas.
Maintenant direction Parthenay terme de notre première journée. Après un accueil chaleureux
de nos hôtes, Pierre et Anne-Marie RUSSEIL au 57 rue Alsace Lorraine, nous partons à la découverte d’une partie de la ville. Christian la connait suffisamment pour servir de guide.
Situé sur un promontoire rocheux la ville s’est développée au moyen Age. Sur le chemin de
Compostelle elle comporte de nombreux édifices religieux comme l’église saint Jacques et la Maison Dieu, mais d’autres vestiges d’églises romanes sont à découvrir.
photo Christian Huort
La Porte Saint Jacques à Parthenay
Nous nous
contenterons du cœur de la ville et commençons par les remparts que nous longeons pour rejoindre la porte Saint Jacques qui est aussi le monument emblème de la ville. Nous entrons dans la vau
Saint Jacques, rue typique où brusquement on se retrouve au Moyen âge avec une centaine de maisons à pan de bois des XIVème et XVème siècles, parfaitement entretenues et bien sûr habitées.
Ancienne rue commerçante de la cité c’est là qu’autrefois, les pèlerins faisaient halte pour se restaurer et faire leurs achats.
photo Christian Huort
La Vau Saint Jacques
Après avoir flané chez un antiquaire, Janine a un don particulier pour les détecter, et dans les
petites rue adjacentes nous nous retrouvons à la porte de la citadelle et sur le parvis de la Mairie d’où on a un panorama magnifique sur la ville. Ensuite une visite au château dont il ne reste que les ruines et les fortification urbaines, s’impose. Les
premières traces d'occupation humaine sur le site du château remonte autour des Xe et XIIesiècles. Durant la première moitié XIIIesiècle on voit les premières constructions
à usage militaire. L'ensemble est fortifié les années suivantes. Le château subit encore des modifications au XVe siècle. Il est rasé en 1830. Les ruines sont classées monuments
historiques. De l’esplanade du château dont il ne subsiste qu’une tour visitable, on a une vue panoramique sur la vallée du Thouet.
Dans le prochain article nous parlerons de la deuxième et dernière étape qui nous
ménera de Parthenay à Coulon.